Le CBRC élargit son projet pilote d’autodépistage couronné de succès grâce à un investissement du gouvernement fédéral.
Puisque ça fonctionne, multiplions les efforts. C’est le principe fondamental qui sous-tend l’accroissement d’échelle du projet pilote d’autodépistage du VIH élaboré par le Centre de recherche communautaire (CBRC). Ce projet a déjà permis de distribuer plus de 8 850 trousses d’autodépistage aux personnes 2SLGBTQIA+ à travers le Canada au cours des deux dernières années.
Les tests d’autodépistage du VIH, approuvés au Canada depuis 2020, contiennent un document qui guident l’utilisateur·rice à travers un prélèvement de sang par une piqûre au doigt pour ensuite le mélanger à trois solutions de petite quantité. D’une grande précision, le test donne un résultat sérologique positif ou négatif en une minute environ. L’utilisateur·rice est invité·e à obtenir une analyse sanguine de confirmation en cas de résultat positif. Le prix de vente d’un test d’autodépistage est d’environ 35 dollars, mais le CBRC espère éliminer cet obstacle financier ainsi que d’autres barrières par la création d’un portail en ligne sur lequel les gens pourront commander les tests gratuitement.
« On ne paie pas pour faire un test de dépistage du VIH auprès d’un médecin, alors pourquoi devrait-on débourser pour un test d’autodépistage? » s’interroge Chris Draenos, responsable national de la mise en œuvre des tests de dépistage du VIH et des ITSS du CBRC. « En fait, cette option coûte sans doute moins cher pour le réseau de santé publique que le montant réclamé par un médecin pour effectuer ce test. »
Ce constat explique peut-être en partie l’octroi de fonds au CBRC pour 15 000 tests d’autodépistage supplémentaires par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) — le ministère responsable de mettre en œuvre la réponse fédérale aux problèmes de santé publique, y compris le VIH. Une autre raison tient à la réalisation des derniers objectifs de l’accélération 95-95-95 de l’ONUSIDA — un engagement mondial auquel le Canada a souscrit et qui prévoit notamment que 95 % de toutes les personnes vivant avec le VIH connaîtront leur statut d’ici 2025.
À l’heure actuelle, on estime qu’une personne vivant avec le VIH sur dix ne connaît pas son état sérologique, ce qui représente des milliers de personnes. Or, si on ne connaît pas son statut, on ne peut pas recevoir de traitement et atteindre une charge virale supprimée qui rend alors impossible la transmission du virus à d’autres personnes.
Les hommes gais, bisexuels et les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes constituent toujours la majorité des nouvelles infections par le VIH. Par conséquent, le dépistage est essentiel pour eux et pour les autres membres de la communauté 2SLGBTQIA+. Or, ces dernières années ont été particulièrement difficiles sur ce plan.
« En Nouvelle-Écosse, le laboratoire a refusé des échantillons pour le VIH et d’autres ITSS pendant de longues périodes, car ces tests mobilisent le même personnel et les appareils qui servent à détecter la COVID », explique Abbey Ferguson, directrice générale du Halifax Sexual Health Centre. « L’accès aux soins primaires demeure également très limité en ce moment, et nous n’avons toujours pas regagné le terrain perdu depuis la COVID pour l’obtention de rendez-vous d’analyses sanguines dans des délais raisonnables. »
Pour toutes ces raisons et d’autres encore, dont la présence de communautés éloignées en Nouvelle-Écosse, Ferguson affirme que le dépistage du VIH par les voies traditionnelles peut être une question de semaines, voire de mois dans sa province. « Dans ce contexte, la possibilité de prendre sa santé en main et de se tester chez soi vaut son pesant d’or. »
C’est pourquoi le Halifax Sexual Health Centre figure parmi la douzaine d’organismes communautaires qui collaborent avec le CBRC pour offrir des tests d’autodépistage du VIH en personne, en plus de la plateforme de commande en ligne du CBRC.
« Je trouve que c’est un véritable succès », estime Ferguson, qui a mis sur pieds des événements de distribution ponctuels dans des lieux comme des bibliothèques. « Cela nous permet de rencontrer les gens là où ils se trouvent, de présenter nos services de manière conviviale et de donner le ton d’une éventuelle expérience de suivi. »
Draenos abonde dans le même sens et précise que les partenariats avec d’autres organismes demeureront un élément clé pour offrir des tests d’autodépistage.
« La distribution communautaire de tests d’autodépistage du VIH permet d’aller plus facilement vers les personnes qui n’ont jamais fait un dépistage auparavant », explique-t-il, soulignant qu’un quart des personnes ayant reçu un test d’autodépistage en personne dans le cadre du projet pilote n’avaient jamais été testées auparavant, contre 10 % de celles qui avaient commandé un test en ligne.
« Les organismes sont très désireux de soutenir l’initiative, mais la plupart ne bénéficient pas d’un financement stable. Maintenant que nous disposons de fonds pour fournir des tests d’autodépistage, notre communauté a l’occasion de nouer des liens et d’avoir des discussions sur la santé et le bien-être. »
La nécessité de distribuer les tests par courrier et en personne constitue l’une des leçons tirées de la distribution du lot initial de 8 000 tests. Selon Draenos, veiller à ce que les tests soient correctement entreposés à l’abri de la chaleur, assister les personnes dans l’interprétation de résultats erronés et s’assurer de la bonne quantité de sang à introduire dans le test figurent parmi les apprentissages clés. Mais ces directives peuvent se transmettre au moyen de documents expédiés avec les trousses, ainsi que par le biais d’une ligne d’assistance.
« Pour les tests d’autodépistage, nous offrons aux membres de la communauté 2SLGBTQIA+ un soutien virtuel par les pairs sous la forme de courriels, d’appels gratuits et de textos », explique Draenos. « Cette forme de communication nous permet également de recommander d’autres ressources en matière de soins et de prévention des ITSS, de soutien en santé mentale et de services de réduction des risques. »
Le CBRC ne s’est pas contenté de proposer qu’un soutien par les pairs pour les tests d’autodépistage du VIH. Des Medicine Bundles ont été offerts aux personnes autochtones bispirituelles souhaitant accéder à des tests d’autodépistage dans la région connue sous le nom colonial de la Colombie-Britannique — un projet parallèle conçu et mené par cette communauté.
« Un Medecine Bundle sert à conserver les objets spirituels qu’on utilise lors de cérémonies », raconte Martin Morberg, le coordonnateur du programme bispirituel du CBRC. Ces remèdes, qui comprennent notamment de la graisse d’ours, de la sauge, du cèdre, du tabac, de la lavande et du foin d’odeur, accompagnent les tests d’autodépistage du VIH afin de promouvoir une approche de la santé plus globale et culturellement pertinente.
« C’est une question de reconnaître l’apport de chaque culture : on comprend que les méthodes occidentales fonctionnent, qu’elles sont étayées par la science et la recherche en ce qui concerne le dépistage du VIH », poursuit Morberg. « Mais on sait aussi que les peuples autochtones ont des conceptions de la santé tout aussi valables. La vision autochtone de la santé va au-delà de l’aspect physique. Plus que des corps, nous sommes des êtres holistiques. On doit également prendre soin de notre esprit lorsqu’on s’occupe de notre santé. »
Comme pour les 15 000 nouveaux tests d’autodépistage du VIH, le CBRC a créé un portail en ligne permettant aux personnes autochtones de la région connue sous le nom colonial de la Colombie-Britannique de commander des Medicine Bundles. Compte tenu de la popularité et des commentaires favorables à l’égard des deux projets, Draenos s’attend à ce que le nombre de demandes demeure élevé.
« Grâce à tout ce travail de recherche, nous avons beaucoup appris sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas en plus de peaufiner nos méthodes pour cibler les éléments les plus importants pour les membres de notre communauté. »
Pour commander une trousse d’autodépistage du VIH, suivez ce lien.
Pour commander un Medicine Bundle dans la région connue sous le nom colonial de la Colombie-Britannique, suivez ce lien.