Allocution de Michael Kwag Excuses de la Société canadienne du sang

Le 10 mai dernier, le chef de la direction de la Société canadienne du sang, le Dr Graham Sher, présenta des excuses officielles aux communautés 2SLGBTQIA+ du Canada.

La Société a reconnu que les critères d’admissibilité au don de sang ont causé des préjudices aux hommes gais, bisexuels et queers, ainsi que les personnes trans et autres membres des communautés 2SLGBTQIA+. Il a été admis que l’ancienne politique qui interdisait aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et à certaines personnes trans de donner du sang et du plasma renforçait la croyance populaire selon laquelle le sang d’une personne serait dangereux à cause de son orientation sexuelle.

Le directeur général du CBRC, Michael Kwag, fait partie du comité consultatif 2SLGBTQIA+ de la Société canadienne du sang. Ce comité a joué un rôle important dans le processus qui a mené à ces excuses officielles. Il participa à la conférence d’excuses où il a fait partage de son opinion et des pistes d’actions pour améliorer l’accès au don de sang et autres matériaux biologiques pour les personnes queers et trans.


L’allocution de Michael

Bonjour tout le monde, ici comme en ligne, et merci à Graham de m’avoir présenté. Pour commencer, je tiens à remercier Graham et son équipe à la Société canadienne du sang d’avoir collaboré avec le CBRC et moi-même pour présenter ces excuses historiques.

Je suis effectivement ici pour représenter le CBRC, un organisme voué à promouvoir le bien-être et la santé des personnes et des communautés queers, trans et bispirituelles partout au Canada.

Sans surprise, l’interdiction de donner du sang visant les personnes 2SLGBTQIA+ au pays nous préoccupe depuis un certain temps. Au CBRC, notre mandat consiste à placer les personnes queers et trans au centre de la recherche sur la santé et les soins. C’est donc avec fierté que nous avons plaidé pour des politiques et des pratiques inclusives et non stigmatisantes en matière de don. Parmi les nombreuses voix qui ont porté ce message, citons les organismes communautaires, les militant·e·s et les chercheur·e·s, sans oublier les personnes queers, qu’on empêche depuis bien trop longtemps de donner du sang et de faire d’autres types de dons médicaux au Canada.

Plus qu’une exclusion, il s’agit d’une ostracisation, d’une altérisation qui a gravement affecté la perception de nos communautés dans la société. On nous voit, et je cite, comme des personnes « dangereuses ou malpropres ».

En présentant ses excuses, la Société canadienne du sang reconnaît qu’elle a perpétué ces croyances nocives et erronées, injustement et bien plus longtemps que nécessaire. Je l’en remercie.

Je tiens aussi à souligner les efforts qu’elle fait pour se positionner comme leader et pour se responsabiliser quant aux torts qui, historiquement, découlent des politiques d’inadmissibilité visant les personnes trans et les hommes gais, bisexuels ou queers. Pour les personnes queers et celles qui vivent avec ou sont touchées par le VIH ou par d’autres pathogènes transmis par le sang, la stigmatisation et la discrimination restent une menace à l’échelle mondiale.

Le fait d’entendre ces excuses et cette reconnaissance des torts causés ici, au Canada, représente une étape cruciale. J’espère que partout dans le monde, les gouvernements et les organismes de réglementation du sang suivront notre exemple. Le Canada est parmi les premiers pays à présenter ce type d’excuses, mais nous avons encore beaucoup de pain sur la planche.

Je me réjouis que les excuses d’aujourd’hui s’accompagnent d’un engagement à rendre les centres de don plus accueillants et plus inclusifs. Cela dit, le don de sang, d’organes, de tissus et d’autres types de matériel biologique est encore un processus plus difficile qu’il ne devrait l’être pour les personnes queers ou trans.

C’est extrêmement frustrant, parce qu’en ce qui concerne le VIH et la santé sexuelle, ce que le CBRC et les organismes en santé communautaire disent aux gens, c’est de prendre leur santé en main. De se faire dépister. De prendre la PrEP ou un traitement pour le VIH. De se renseigner sur le principe I=I, qui nous dit le VIH ne peut pas être transmis à un·e partenaire sexuel·le si la charge virale est indétectable. De le faire pour eux-mêmes et pour les autres.

Pourtant, le fait de prendre la PrEP, qui est l’outil de prévention du VIH fondé sur le plus de données probantes, nous empêche de donner du sang. Je ne peux pas faire de don de sang pour cette raison.

C’est exaspérant. Prenez le temps d’y penser.

Je suis un homme gai à la tête du plus vaste organisme en santé queer au Canada. Je fais certains choix, notamment celui de prendre la PrEP, parce que la science me dit que c’est un bon moyen de me protéger et de protéger les autres.

Et on m’interdit quand même de donner du sang.

Mon intention n’est pas de discréditer les changements visant les politiques d’inadmissibilité qui ont été faits ces dernières années, ni les excuses présentées aujourd’hui.

Mon objectif est plutôt d’illustrer le gouffre entre ce que notre communauté veut, soit un pays où tout le monde est en santé et en sécurité, et la façon dont les centres de don nous traitent et parlent de nous.

Maintenant que le Canada s’est positionné comme leader mondial en présentant des excuses, il est temps de faire avancer la recherche scientifique sur la gestion des risques associés aux dons de sang, d’organes et de tissus, entre autres dons médicaux.

Tout le monde veut une banque de sang sûre et disponible pour toutes les personnes qui en ont besoin, y compris les personnes queers ou trans et les autres personnes affectées par des politiques qui, de manière disproportionnée, empêchent certaines communautés de donner du sang, que ce soit à court terme ou à vie. Pensons notamment aux communautés africaine, caribéenne et noire, qui sont touchées par les politiques de don concernant la malaria, ainsi que les personnes qui travaillent dans l’industrie du sexe.

Beaucoup de personnes queers ou trans appartiennent aussi à ces communautés. Le problème nous concerne donc toustes.

Au nom de toutes les personnes qu’on a empêchées ou qu’on empêche encore de faire un don, je dis : continuons de militer. Les excuses d’aujourd’hui sont la preuve qu’ensemble, en misant sur la compréhension et l’empathie, nous pouvons améliorer le système canadien de don de sang. Nous pouvons faire mieux.

Je le répète : tout le monde veut que le Canada soit un pays sûr et en santé. À nous de bâtir ce pays.

Merci.

Visionnez la conférence ici:

Available in English.

CBRC

À propos du CBRC

Le Centre de recherche communautaire (CBRC) promeut la santé des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre par le biais de la recherche et du développement d’interventions.
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