Mise en garde : Ces témoignages sont l’expérience personnelle de personnes ayant été infectées par la mpox. Ils contiennent des descriptions choquantes des symptômes physiques et mentaux dont ces personnes ont souffert. La lecture de ces témoignages peut être dérangeante.
John L
J’habite à Calgary. Le jeudi 28 juillet, j’ai remarqué quelques petites taches sur le bout de mon pénis. Vendredi, j’ai passé une journée normale; samedi, j’ai vu des ami·e·s. Ce soir-là, j’ai commencé à avoir des douleurs extrêmes au bas du dos. Comme j’avais passé du temps sur la route pour le travail, j’ai dit à mes ami·e·s que c’était probablement ma sciatique et que je prendrais rendez-vous pour un massage au courant de la semaine. Les 72 heures qui ont suivi m’en ont fait voir de toutes les couleurs.
Le premier soir, j’ai eu des sueurs nocturnes intenses. Dimanche, je n’avais aucune énergie, donc je me suis reposé. Plus tard, comme j’étais encore fatigué et que j’avais un début de mal de gorge, j’ai visité une clinique sans rendez-vous (mon test de dépistage de la COVID-19 était négatif, donc je savais que j’avais autre chose). La clinique s’est avérée une perte de temps. Le médecin n’a même pas examiné mon pénis. Quand je lui ai montré des photos prises avec mon téléphone, il m’a donné un papier de laboratoire pour que je puisse faire des tests de dépistage des ITS pendant la longue fin de semaine.
Ce soir-là, les sueurs nocturnes sont revenues et mon mal de gorge a empiré. Je me suis retrouvé à l’urgence. J’ai été vu par un autre médecin. Comme le premier, après un coup d’œil, il m’a dit : « Oh, je ne pense pas que ce soit la mpox du singe. Vous n’avez pas d’autre symptôme ni d’éruption cutanée sur les mains. » Il m’a simplement touché le cou pour vous si mes ganglions étaient enflés, sans m’examiner la gorge. J’ai fait des tests sanguins et il a fait un prélèvement sur le bout de mon pénis, mais j’ai dû demander qu’on vérifie que ce n’était pas la mpox du singe. Là encore, personne ne m’a examiné la gorge. Ironiquement, j’avais déjà rendez-vous pour me faire vacciner le mardi matin.
J’ai appelé le 811, mais ça n’a servi à rien. On m’a dit d’aller à mon rendez-vous quand même. Une fois sur place, j’ai tout expliqué. L’infirmière en chef est entrée et m’a fait me déshabiller. Son verdict : c’était un cas clair de mpox du singe. Elle m’a dit de rentrer chez moi et d’y rester. Sans me donner aucune autre information, on m’a dit que le service des maladies à transmission communautaire m’appellerait dans l’après-midi.
Un peu plus tard, j’ai reçu l’appel d’un·e infirmier·ère. J’ai passé une heure et demie à retracer mes contacts des 21 derniers jours, puis j’ai fourni une liste des personnes avec qui j’avais été. L’interaction était immédiatement stigmatisante. Ce jour-là, je suis passé par un tourbillon d’émotions. En soirée, mon mal de gorge était tellement douloureux que je n’arrivais plus à avaler ma salive. En tout, j’ai perdu 10 livres. J’étais en mode panique. Quand j’essayais de dormir, mon corps me démangeait constamment. J’ai même développé une éruption cutanée due au stress.
J’étais une vraie boule de stress. J’ai communiqué avec une clinique où j’avais déjà été pour la maladie de Crohn. Un·e infirmier·ère a essayé de m’aider, mais encore une fois, sans aucune ressource. La seule information disponible venait de Vancouver. Les Services de santé de l’Alberta n’ont même pas pris la peine de préparer des documents. L’infirmier·ère m’a seulement dit que je devais éviter tous les contacts pendant jusqu’à quatre semaines (aucun rapport sexuel) et que la mpox du singe pouvait survivre huit semaines dans le sperme. J’ai demandé si ça voulait dire que je devais être abstinent pendant trois mois. Je savais qu’il était possible de faire tester son sperme au Royaume-Uni, mais quand j’ai posé la question, on m’a dit que ça ne se faisait pas ici.
Mon·ma médecin de famille m’a dit que c’était comme ça et que je devais simplement me reposer. J’étais laissé à moi-même, sans autre information, forcé d’utiliser mon téléphone pour trouver de l’aide et des réponses en ligne. Je connais des gens qui ont pris l’avion pour Vancouver et s’y sont fait vacciner beaucoup plus rapidement qu’ici, le vaccin étant très difficile d’accès en Alberta.
On pense que ça n’arrive qu’aux autres. Je suis un gars célibataire. J’ai passé les deux dernières années et demie seul. Je recommençais tout juste à voir des gens; j’avais perdu le poids gagné durant la pandémie et repris confiance en moi. Après avoir trouvé le confinement extrêmement difficile, je me sens à nouveau seul. Ça m’attriste et m’effraie. Je suis très prudent dans mes rencontres, mais après trois rapports sexuels avec deux gars, j’ai développé des symptômes.
Je sais que les cas de mpox du singe qui entraînent la mort sont très rares, mais j’ai du mal à ne pas voir les parallèles avec la pandémie de sida. À l’époque, quand un homme gai avec des lésions sur le visage marchait dans la rue, les gens le pointaient du doigt et craignaient de lui ressembler. Quarante ans plus tard, n’avons-nous rien appris?
John L. (pseudonyme) vit à Calgary.
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[Le CBRC a invité des personnes qui ont souffert de la mpox à nous faire partager leur expérience, en espérant réduire la stigmatisation associée à la maladie et permettre la circulation d’information de première main au sein de nos communautés. Nous savons que ce qui est fait actuellement pour soutenir les personnes qui contractent la mpox n’est pas assez. Nous tenons à remercier ces personnes qui ont accepté de nous raconter leur histoire publiquement et à souligner leur courage.]