PPrE injectable : il est nécessaire d’adopter une nouvelle approche

Auteur : James Morrison (il), pharmacien propriétaire, Toronto

En novembre 2023, dans le cadre du sommet annuel du Centre de recherche communautaire (CBRC) tenu à Vancouver, j’ai eu le plaisir de participer à un petit groupe de discussion sur les problèmes de mise en œuvre relatifs à la prophylaxie préexposition (PPrE) à action prolongée. La conversation, animée par Darrell Tan, a regroupé des spécialistes du milieu de la santé d’un peu partout au pays, notamment des infirmier·ère·s, des travailleur·euse·s sociaux·le·s et des pharmacien·ne·s qui exercent leur profession dans différents cadres.

L’enthousiasme était palpable au sein du groupe au sujet de l’arrivée attendue de la PPrE à action prolongée au Canada, et les participant·e·s étaient fortement d’avis qu’il était très positif que les personnes ayant recours à la PPrE aient davantage d’options. Nous avons tous·tes rencontré des gens qui ne se sentaient pas à l’aide de stocker de grande quantité de comprimés pour diverses raisons. Nous savons également que, pour obtenir une efficacité maximale, un haut degré d’observance du traitement est indispensable. Pour certaines personnes, il est difficile de prendre quotidiennement des médicaments. C’est pourquoi la PPrE à action prolongée offerte en injection à tous les deux mois est très attrayante.

Les pharmacies communautaires constituent sans doute un endroit idéal pour l’administration de la PPrE à action prolongée, en raison de leur accessibilité. Elles permettraient en outre de réduire la demande envers les cliniques spécialisées et les médecins de famille. Au cours de la discussion, nous avons défini des obstacles à la disponibilité généralisée de la PPrE à action prolongée. Voici quelques-uns de ces obstacles d’un point de vue d’un·e pharmacien·ne.

Financement

Il est crucial que la PPrE à action prolongée soit couverte par tous les régimes d’assurance médicaments publics et les organismes payeurs privés afin d’assurer un accès équitable dans l’ensemble du pays. Les pharmacies communautaires pourraient être appelées à administrer la PPrE à action prolongée à leur patientèle. Idéalement, il faudrait des fonds pour soutenir l’administration du médicament, puisqu’il y a des coûts associés à ce service. Au sein du groupe de discussion, les participant·e·s étaient fortement d’avis que la perception de frais par les pharmacies pour l’administration de la PPrE à action prolongée risquerait de créer des obstacles à l’accès. Il est possible que des pharmacies souhaitent absorber les coûts afférents, mais il reviendra à chacune de prendre ses propres décisions.

Collaboration

Il a été possible pour les fournisseurs et les pharmacies en milieu urbain de distribuer la PPrE par voie orale, peu importe leur emplacement, mais ce modèle risque de ne pas fonctionner dans le cas de la PPrE injectable à action prolongée. Le Canada est un pays énorme, et les patient·e·s voudront recevoir leur traitement près de chez elleux. Les personnes qui prescrivent le médicament devront pouvoir compter sur un réseau de lieux d’administration. Les participant·e·s au groupe de discussion estimaient que les pharmacies étaient des lieux appropriés, si elles sont dotées de salles privées et du personnel disposé à administrer le médicament.

Communication

Dans bon nombre de provinces et de territoires, les systèmes de données sont fragmentés entre les pharmacies et les cliniques. Il sera important d’établir des communications claires entre les personnes qui prescrivent le médicament et les lieux d’injection afin que toutes les parties sachent si les doses sont données à temps. Il faudrait également encourager les lieux d’injection à aider les personnes qui ont recours à la PPrE à action prolongée à suivre leur calendrier d’injection. On pourrait faire appel à la technologie pour créer un portail centralisé qui permettrait aux clinicien·ne·s de travailler ensemble à distance et d’envoyer des rappels à leur patientèle. Les personnes qui prescrivent le médicament auront peut-être aussi besoin du soutien des pharmacies pour encourager les patient·e·s à effectuer leurs tests de laboratoire à temps pour assurer un suivi approprié. Si la technologie numérique n’est pas possible, il faudra pouvoir communiquer par téléphone ou par télécopieur.

Formation

À l’extérieur des centres urbains, bon nombre de pharmacien·ne·s ne connaissent pas la PPrE ni ses aspects cliniques, comme le calendrier d’injection et de tests de laboratoire de suivi. La prévention et le traitement du VIH n’ont jamais été bien couverts dans les programmes d’études de premier cycle en pharmacie, probablement en raison de la complexité du sujet et du temps limité. Par ailleurs, les professionnel·le·s en pharmacie ont reçu une formation sur l’injection de médicaments, mais iels ne possèdent peut-être pas d’expérience en injection dans le muscle ventroglutéal. Il est probable que les pharmacien·ne·s qui offrent la PPrE à action prolongée aient besoin d’une formation clinique sur le traitement et d’une formation technique sur l’administration du médicament.

Il faudra aussi appuyer les pharmacies pour qu’elles soient des centres de soin favorables à l’affirmation pour les patient·e·s qui reçoivent la PPrE à action prolongée. Il s’agit également d’un domaine pour lequel les pharmacien·ne·s n’ont pas nécessairement reçu de formation; certain·e·s ont peut-être même des pratiques discriminatoires. Les services d’injection de PPrE à action prolongée devraient uniquement être offerts dans les pharmacies qui fournissent des soins qui respectent les différences culturelles.

Principaux points à retenir

Si elles le planifient bien, les pharmacies pourraient être mobilisées pour assurer la vaste accessibilité de la PPrE à action prolongée. Personnellement, je crois que bon nombre d’entre elles seraient des partenaires exceptionnelles dans le soutien aux patient·e·s qui reçoivent la PPrE à action prolongée, et je vise à offrir ce service dans mes pharmacies de Toronto.

 

James Morrison (il)

 

Available in English.

CBRC

À propos de CBRC

Le Centre de recherche communautaire (CBRC) promeut la santé des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre par le biais de la recherche et du développement d’interventions.
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